Les questions sur le THM

Véronique Cayol

Gynécologue

Sommaire

> Est-ce dangereux de prendre un traitement hormonal ? 

> L’étude qui a remis en question l’utilisation du THM

> La remise en question de cette étude 

> Conclusion récentes et recommandations

> Conclusion


A Lorsque ces symptômes impactent la qualité de vie ou la santé, on peut proposer un traitement hormonal de la ménopause (THM), pour pallier cette carence brutale en oestrogènes. Les questions sur le THM sont nombreuses : est-il dangereux ? Quels sont les risques ? Quelles sont les conséquences si l'on arrête le THM ?

Les réponses à ces questions dans cet article !


Le traitement hormonal : il y a-t-il des dangers ?

Incontestablement le traitement le plus efficace contre les bouffées de chaleur,  les sueurs nocturnes ou encore les sécheresses vaginales est le traitement hormonal de la ménopause (THM). Ce traitement est également efficace pour réguler la plupart des signes climatériques. Il s'agit de symptômes comme les troubles de l’humeur, les troubles du sommeil, les douleurs articulaires, la baisse de libido...


Toutefois ce traitement n’est aujourd’hui prescrit qu’à 7% des françaises ménopausées. Ce taux s’élevait à 40% au début des années 90. Le traitement hormonal n’est pas dangereux au contraire, sauf dans de très rares cas. 


Comment expliquer un abandon aussi massif ? Quelles en sont les causes scientifiques ?


L’étude qui a remis en question l’utilisation du THM

Au début des années 2000 les résultats d’une étude américaine en prévention primaire contre placebo (c’est-à-dire qu’on a comparé les effets préventifs du THM contre un placebo) menée par la Women’s Health Initiative (WHI) ont remis en question l’intérêt du traitement hormonal de la ménopause.


Cette étude proposait le THM en prévention aux femmes pour diminuer leur risque cardiovasculaire, la mortalité féminine étant majoritairement cardiovasculaire (45% de la mortalité des femmes est due aux infarctus, AVC...)


Or les estrogènes dans des études antérieures avaient montré une efficacité sur la baisse du diabète, des hyperlipémies et une amélioration de l'espérance de vie chez des femmes traitées en début de ménopause (< 60ans). D’ailleurs, jusqu’à la ménopause, les femmes ont un risque cardio-vasculaire moins élevé que les hommes et rattrapent ce risque à la ménopause, ce qui permettait donc déjà de penser que les hormones féminines (les oestrogènes) étaient protectrices !


Cette étude WHI a dû être interrompue après 5 ans pour plusieurs raisons :

  1. Le traitement augmentait le risque de cancer du sein (nous le savions déjà pour le type de THM utilisé par les Américains, différent de celui utilisé en France)
  2. Mais surtout il augmentait de façon significative le risque d’infarctus du myocarde

Si les deux effets secondaires ci-dessus sont les deux principaux, voici d’autres effets secondaires rapportés : augmentation des risques d’AVC, des phlébites et embolies pulmonaires, augmentation du risque de cancer de l’endomètre...

Par contre, l’étude confirma bien la baisse du risque de cancer du côlon et surtout de l’ostéoporose fracturaire même dans une population sans fragilité osseuse.


Cette première et seule publication randomisée (avec comparaison placebo) a eu l’effet d’une bombe et a conduit sur le plan international à l’arrêt du jour au lendemain des THM en France comme ailleurs même si cette WHI ne mettait pas en évidence d’augmentation de la mortalité sous THM.


Comment expliquer ces résultats contradictoires ?

Deux raisons à cela :

  • la population de l’étude WHI était trop âgée (moyenne d’âge 63 ans dont 20% avaient plus de 70 ans )
  • et le traitement comportait des oestrogènes équins (issus des urines de jument) et un progestatif à risques métaboliques et vasculaires (MPA)

Il faut savoir qu’en France le THM « à la française » comprend de l’estradiol (surtout en gel ou patch pour éviter le risque de phlébite) et de la progestérone (hormones bio identiques à ce que les ovaires sécrètent avant la ménopause). L'étude WHI utilise donc des molécules bien différentes.£


Avant cette étude beaucoup de femmes prenaient le traitement pendant très longtemps, mais après l’étude WHI les recommandations ont été de ne donner le traitement hormonal qu’à dose minimale pour la durée la plus courte possible et uniquement pour traiter les bouffées de chaleur et les symptômes altérant fortement la qualité de vie des femmes.


La remise en question de cette étude sur le THM

Cette étude a fait perdre confiance en l’intérêt du traitement hormonal pour les femmes, même si les limites de cette étude ont été ensuite soulignées par une analyse en fonction de l’âge des femmes, de leurs facteurs de risque et du type de traitement prescrit.


En effet, on s’est rendu compte après une analyse par tranches d’âge de la WHI et un suivi ultérieur de 18 ans que les femmes traitées en début de ménopause (< 60 ans) présentaient bien une diminution de la morbi-mortalité cardiovasculaire comme attendu, à l’inverse des plus âgées au contraire.

Pour les risques de thromboses veineuses (phlébites et embolies pulmonaires) ils étaient dûs aux estrogènes administrés par voie orale. Ce n’est pas le cas des estrogènes administrés par voie transdermiques, que nous utilisons en France (études européennes et françaises).


Quand les molécules et la population sont différentes, les conclusions ne peuvent donc pas s’appliquer !

Enfin, pour le risque de cancer du sein il est important de comprendre que le traitement hormonal de la ménopause ne donne pas le cancer du sein mais peut promouvoir le développement d’ un micro-cancer déjà existant. C’est d’autre part surtout le cas pour le THM comprenant des progestatifs de synthèse (différent de ce qu’on administre en France, donc)


Conclusions récentes et recommandations

Finalement, quel est le sur-risque de cancer du sein ?

Une analyse du Lancet (une revue scientifique médicale britannique) de 2019 a publié ensuite une méta-analyse reprenant toutes les études sur le sujet à l’échelle mondiale pour tirer des conclusions plus robustes.

Le THM s'associe d'une augmentation du risque de cancer du sein avec la durée de traitement et il perdure jusqu'à 10 ans après son arrêt.

Pour les auteurs, en supposant que la relation soit causale, 5 ans de THM associant estrogènes + progestatifs augmenterait de 1 cas pour 50 femmes traitées à 50 ans pendant 5 ans.

Il faut garder à l’esprit qu’en dehors de tout THM 1 femme sur 9 présente un cancer du sein.

En sait-on plus sur la provenance du risque ? Oestrogènes ou progestérone ?

Le traitement hormonal de la ménopause associe des oestrogènes. On l'applique le plus souvent par voie cutanée et de la progestérone qu’on prend le soir en comprimés.


Ce sont les oestrogènes essentiellement qui guérissent les symptômes. Mais ceux-ci ont un effet notoire sur l’endomètre (la muqueuse utérine) ce qui nécessite d’y adjoindre de la progestérone.

Chez les femmes qui ont subi une hystérectomie (qui n’ont donc plus d’utérus), le traitement ne comprend pas de progestatif. En effet, il n’est plus nécessaire de protéger l’utérus.


Dans la WHI, les femmes sous oestrogènes seuls avaient une baisse de risque de cancer du sein en prenant le THM ! On peut donc en déduire que ce sont les progestatifs qui augmentent le risque mammaire.


La progestérone utilisée spécifiquement en France dans le THM n’était pas ou très peu incluse dans les études internationales. Il est donc incertain que notre progestérone en particulier augmente le risque de cancer du sein ! Une étude française appelée “E3N” a même démontré que ce n’était pas le cas, avec une simple tendance légère seulement à partir de 8 ans de traitement .

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Conséquences de l’arrêt de la prise du THM chez les femmes

Après l’arrêt de la prescription du THM qui a suivi l’étude de 2002, on a vu revenir les problèmes d’ostéoporose qui avaient disparu avec la prescription du THM sur le long terme. Le THM permettait en effet de la prévenir.


On peut d’ailleurs constater ces dernières années un nombre de fractures graves qui a augmenté chez les femmes de plus de 65 ans. Ces femmes ont donc été ménopausées juste après la WHI et n’ont pas bénéficié du THM.

Conclusion

Le THM a aussi des bénéfices positifs à long terme sur la santé des femmes. Il n’est toutefois plus aujourd’hui prescrit pendant un temps indéfini. On le prescrit plutôt pendant quelques années, le temps que les symptômes s’estompent, puis à la dose minimale et sous surveillance pour les patientes en ressentant le besoin.


Désormais on traite les femmes en début de ménopause avant 60 ans ( « fenêtre d’intervention »). C'est le moment où les symptômes sont les plus gênants. C'est aussi à ce moment que le traitement aura des effets de prévention de fracture ostéoporotique et cardiovasculaire.


Votre médecin ou gynécologue saura vous aiguiller sur la pertinence de ce traitement dans votre cas personnel. Attention, le THM est contre-indiqué chez les patientes ayant déjà eu un antécédent de cancer du sein. En effet, les hormones pourraient favoriser la prolifération des cellules tumorales.


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